Ancien projet pour le City Media de Seconde Nature, dirigé par Douglas Edric Stanley.
Le dispositif a été conçu à la base pour être installé dans les bibliothèques d’Aix-en-Provence et de Marseille. Le contexte de la bibliothèque m’a permis d’imaginer une application qui servirait d’atelier d’écriture. L’utilisateur face à ce mur se comportant de manière assez négligente, il a fallu réfléchir à une écriture générative qui permet un réajustement par la suite.
Mode de fonctionnement : Chaque mot a deux positions : on le touche une première fois, on peut le changer de place. On le touche une deuxième fois, il garde en mémoire le déplacement qu’on lui fait effectuer. Quand on le lâche, il le rejoue indéfiniment. Sur le côté droit un menu pemet d’accéder aux différentes scènes.
Regarder la vidéo de démo
cityMedia cut2 from CassandreP on Vimeo.
Méthode de travail Le «mur communiquant» a été installé à la bibliothèque Méjanes d’Aix-en-Provence et à la bibliothèque l’Alcazar de Marseille. Le statut de ces lieux est très intéressant pour ce genre de projet, entre espace public (que l’on peut s’approprier, que l’on arpente, dans lequel on a ses marques) et espace culturel (empreint d’autorité et de sérieux). Pour moi c’est aussi le lieu où chaque personne a son bagage culturel personnel (un livre d’un tel, un film d’un autre, etc…) Elle peut y trouver ce qui l’enrichit et qui fait partie d’elle. Pour composer des poèmes, des récits, il y a eu beaucoup d’expérimentations aux règles et contraintes développées notamment par les gens de l’Oulipo. J’ai envie de trouver des manières de générer des histoires autrement qu’en assemblant les mots derrière les autres (littérature combinatoire), comme le dit Giono, et d’inclure aussi les images dans le processus. Pour «Intrigues en marche», l’image n’est pas encore bien définie. Pour moi ce devaient être des images trouvées à la bibliothèque. J’avais donc découpé des éléments de bande dessinée différentes pour recomposer des paysages. Mais les mots ne se sont pas trouvés très à l’aise dans ces fonds. J’ai ensuite beaucoup joué sur l’idée de la carte, avec des esthétiques et donc des registres différents : carte de jeux vidéo, carte ancienne de Russie, carte de roman d’heroïc fantasy. J’ai décidé de prendre des bouts de livres qui représentent certains genres de littérature (science-fiction, héroïc fantasy, conte, policier, western, érotique, aventure, historique, etc). Lorsque l’on ouvre chacun de ces livres, on va y trouver un type de vocabulaire précis inhérent à ce genre de littérature. Le mot sur l’image vient souvent en tant que légende, ce qui est une manière d’augmenter l’image et de créer un certain sens en dirigeant la compréhension de l’image. Il peuvent l’augmenter également quand ils sont la représentation de ce que dit un personnage, dans le cas précis des bandes dessinées. Dans «Intrigues en marche», les mots sont transformés en sujets que l’on met en position comme pour un combat sur les images ou sur les cartes, puis qui prennent vie et se mettent à se déplacer. Les entrechocs de sens générés pendant leurs déplacements sont intéressants. L’utilisateur prend différentes positions. Il peut prendre le mot «mer» et le poser sur la mer, ou prendre le même mot et le mettre dans les terres, créant ainsi une nouvelle mer à cet endroit. Ou bien il peut prendre toujours le mot «mer» et, dans son déplacement, l’associer d’abord à «magique», puis il va rejoindre «pris au piège», ce qui ne génèrera pas les mêmes significations.
Jean GIONO, «Noé» qui parle de comment est–ce qu’il a écrit «Un roi sans divertissement». «Il ne m’est pas possible de faire connaître l’histoire que je raconte, le livre que j’écris, comme on fait connaître un paysage, (comme Brueghel fait connaître un paysage) avec des milliers de détails et d’histoires particulières. Il ne m’est pas possible (je le regrette) de m’exprimer comme s’exprime le musicien qui fait trotter à la fois tous les instruments. On les entends tous, on est impressionné par l’ensemble, on est impressionné par le chant ou par l’accompagnement, ou par tel timbre, ou par les bois, ou par les cuivres, ou par les cors, ou par les cymbales qui se mettent à gronder juste au moment où le basson était en train de s’exprimer, autant que faire se peut, à la lisière d’un verger, semble-t-il, et le total fait un grand drame. Je n’avais pas projeté, avec Langlois, d’exprimer le total. Ou alors, il faut en revenir à ce que je disais tout à l’heure : se donner à tâche d’exprimer la «monstrueuse accumulation». Mais, là alors, avec l’écriture on n’a pas un instrument bien docile. Le musicien peut faire entendre simultanément un très grand nombre de timbres. Il y a évidemment une limite qu’il ne peut pas dépasser, mais nous, avec l’écriture, nous serions même bien contents de l’atteindre, cette limite. Car nous sommes obligés de raconter à la queue leu leu ; les mots s’écrivent les uns à la suite des autres, et les histoires, tout ce qu’on peut faire, c’est de les enchaîner. Tandis que Brueghel, il tue un cochon dans le coin gauche, il plume une oie un peu plus haut, il passe une main coquine sous les seins de la femme en rouge et, là-haut à droite, il s’assoit sur un tonneau en brandissant une broche qui traverse une enfilade de six beaux merles bleus. Et on a beau ne faire attention qu’au cochon rose et à l’acier du couteau qui l’égorge, on a en même temps dans l’oeil le blanc des plumes, le pourpre du corsage, le brun du tonneau et le bleu des merles. Pour raconter la même chose je n’ai, moi, que des mots qu’on lit les uns après les autres (et on en saute).»
///
The « city wall » will be set in two libraries, in Méjanes d’Aix-en-Provence and at the Alcazar library in Marseille. The status of these two places – between public space (that we can make ours, that we can pace up and down, in which we have our own reference points) and cultural space (dignified) – is interesting for this kind of project. For me, this is the space where everyone has his cultural bag (a book by a guy, a movie by another, and so on…). They can find here what enriches them and becomes a part of them. There has been a lot of experiments in composing poems, stories, their rules and constraints have been codified, in particular by people from Oulipo (in French, Ouvroir de Littérature Potentiel). I want to find other ways to generate stories than just assembling one word behind the other (for instance combinatory literature), as Giono says, and to include also pictures in the process. In “intrigues in motion”, the image is not defined yet. At the beginning I wanted to use pictures found at the library. Therefore I’ve cut elements from different comic books to recompose landscapes. But the words didn’t feel comfortable unto these backgrounds. Then I played with maps, with different aesthetics and styles : a video game’s map, an old Russian map, an heroic fantasy map… I decided to pick up pieces of books that represent some literary genre (science-fiction, heroic fantasy, tales, detective novels, Western, erotic, adventure, historical, etc). When we open each of these books, we are gonna find a kind of vocabulary inherent in this kind of literature. The word on the picture comes often as a caption, which is a way to enhance the picture and create a certain meaning by driving the picture’s comprehension. Words can also enrich pictures when they represent a character’s speech, in the case of comics. In “intrigues in motion”, the words are turned into troops that we deploy on the pictures or the maps, then that come to life and begin to move. The clash of meaning generated through their moves is interesting. The user takes several positions. He can take the word “sea” and put it on the sea, or take the same word and put it on the ground, creating, in this way, a new sea in this location. Or, he can take this same word, “sea”, and, by moving it, associate it first with “magical”, then he meets “trapped”, which will not generate the same meanings.